Indicateur du phosphore
L'indicateur du phosphore (nom officiel : indicateur du risque de contamination de l'eau par le phosphore) permet d'évaluer le risque de contamination des eaux de surface par le phosphore à l'échelle des bassins hydrographiques dans les régions agricoles du Canada. Cet indicateur a permis de suivre le risque attribuable au phosphore provenant des activités agricoles au Canada, de 1981 à 2011.
Que sont les indicateurs agroenvironnementaux?
Les indicateurs agroenvironnementaux (IAE) mesurent les conditions, risques et changements environnementaux attribuables à l'agriculture et jaugent les pratiques de gestion que les producteurs mettent en œuvre pour atténuer ces risques. Ils contribuent à expliquer :
- la performance du secteur agricole;
- les raisons de cette performance;
- le degré de satisfaction à l'égard de la performance;
- l'évolution probable de la performance.
Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) réunit et analyse des données et présente des rapports sur les IAE depuis 1993, mais le Ministère utilise les données depuis au moins 1981. L'indicateur du phosphore est l'un des indicateurs nationaux que suit AAC.
État et tendance d'ensemble
Le risque de contamination de l’eau par le phosphore est à la hausse au Canada : la majorité des terres agricoles présentant un risque moyen en 2011. De 1981 à 2011, le risque a augmenté dans 50 % des terres agricoles, surtout en raison de l’augmentation de la superficie traitée avec des engrais et de l’intensification de la production animale dans certaines régions, ainsi que des précipitations exceptionnellement abondantes et du ruissellement nival anormalement élevé dans les Prairies en 2011.
La carte interactive qui suit permet d’agrandir et d’explorer différentes régions. À noter que dans les Prairies, le risque est considéré comme moyen, avec des zones à risque faible et très faible dans le nord et le centre, et des zones à risque élevé et très élevé dans le sud de la Saskatchewan et du Manitoba de même que dans la région centrale de l’Alberta. Le risque accru dans certaines zones s’explique par la combinaison du facteur source – les concentrations de phosphore du sol sont à la hausse en raison de l’utilisation d’engrais minéraux et du fumier des productions animales – et du facteur transport – le phosphore migre aux plans d’eau de surface. Le risque de contamination est également élevé dans la vallée du bas Fraser, en Colombie-Britannique, et on attribue ce risque accru à une concentration plus élevée d’élevages dans la région. Le risque est plus faible, bien qu’il augmente de façon constante, dans l’est du Canada et dans les provinces de l’Atlantique.
Outre les valeurs de 2011, il est possible de visualiser l’évolution dans le temps en cliquant sur le bouton de lecture. De 1981 à 2011, il y a eu une augmentation du risque dans toutes les régions agricoles du Canada. Cette augmentation est particulièrement évidente dans les Prairies, bien que le risque ait augmenté sensiblement dans certaines régions de l’est du Canada, la région de la rivière de la Paix dans le nord de l’Alberta et la vallée du bas Fraser en Colombie-Britannique.
Legend :
Utilisez la carte interactive de la figure 2 pour voir l'évolution du risque de contamination de l'eau par le phosphore. La carte utilise une gamme de couleurs pour illustrer les changements négatifs (rouges et orangés) et les changements positifs (verts) survenus de 1981 à 2011. Le risque augmente partout au Canada, et cette augmentation est particulièrement évidente dans les Prairies.
Legend :
Évolution du risque de contamination de l'eau par le phosphore de 1981 à 2011
L'état et la tendance de l'indicateur de phosphore peuvent également s'observer dans l'indice de performance ci-dessous.

Description - Figure 3
Année | Valeur de l'indice |
---|---|
1981 | 96 |
1986 | 85 |
1991 | 80 |
1996 | 77 |
2001 | 92 |
2006 | 77 |
2011 | 56 |
En 2011, l’état de l’environnement, du point de vue du phosphore provenant des activités agricoles au Canada, se trouvait dans la catégorie « moyen ». L’indice révèle une tendance à la baisse, ce qui représente un risque accru pour la qualité de l’eau. Pour que l’eau soit contaminée par le phosphore, il faut une source de phosphore et un moyen de transport, par exemple un important ruissellement nival ou pluvial. La composante « source » a augmenté quelque peu en raison de l’utilisation d’engrais minéraux au cours des trente dernières années et de l’intensification des productions animales dans certaines régions. Le ruissellement printanier anormalement abondant dans plusieurs grands bassins hydrographiques, qui a augmenté le transport du phosphore en 2011, a joué un rôle encore plus important dans la chute des valeurs observées de 2006 à 2011. En 2001, l’indice très élevé est dû au ruissellement exceptionnellement faible dans les Prairies cette année-là, qui a diminué le risque de contamination de l’eau par le phosphore.
L'indice groupe et généralise les tendances, et il doit donc être considéré comme un outil stratégique donnant une vue d'ensemble de l'état et de la tendance au fil du temps.
Tendances particulières
- Tendance 1 – Le phosphore s'accumule dans les sols du Canada
- Tendance 2 – Les précipitations augmentent le risque de contamination
Voici quelques-unes des autres tendances d'intérêt. Parfois, elles s'observent dans certaines régions et, parfois, elles touchent certains secteurs, comme les industries du bœuf et des produits laitiers. Il ne s'agit pas d'une liste exhaustive; le rapport complet contient d'autres constatations : L'agriculture écologiquement durable au Canada : Série sur les indicateurs agroenvironnementaux - Rapport no 4.
Tendance 1 – Le phosphore s'accumule dans les sols du Canada.
Le phosphore est solidement fixé aux particules du sol de sorte que seule une fraction du phosphore appliqué sous forme d'engrais ou de fumier est disponible pour les cultures au cours de l'année où il est appliqué. De plus, le fumier épandu pour satisfaire aux besoins en azote des cultures leur fournit plus de phosphore qu'elles n'en ont besoin. Par conséquent, la quantité appliquée dépasse souvent la quantité absorbée par la partie récoltée des cultures. Autrement dit, le phosphore s'accumule dans le sol avec le temps, créant un bilan de phosphore positif. En plus d'être soustrait par la récolte, le phosphore accumulé peut être emporté par le ruissellement pluvial ou nival. Un ruissellement suffisant détrempe les sols et peut en libérer de grandes quantités de phosphore qui créent un risque pour les plans d'eau à proximité. Dans certaines provinces, le bilan du phosphore est plutôt élevé, et le phosphore continue de s'accumuler dans le sol.
La figure 4 (ci-dessous) montre le bilan annuel du phosphore par province (sauf pour les provinces de l'Atlantique, dont le bilan est combiné) de 1981 à 2011. Les bilans les plus élevés ont été enregistrés dans les provinces de l'Atlantique (productions animales et production de pommes de terre intensives), au Québec (productions animales intensives), en Colombie-Britannique (productions animales et horticoles intensives) et en Ontario. Dans l'est du Canada, la tendance du bilan du phosphore est à la baisse, mais demeure légèrement positive en Ontario. Même si l'Ontario est la province qui est le plus près de l'équilibre entre les apports et les retraits de phosphore, le P s'y accumule un peu chaque année dans le sol. En revanche, dans les Prairies, les bilans étaient nuls ou négatifs pour les premiers recensements, mais la tendance a été inversée avec l'intensification de la production agricole et l'augmentation consécutive de l'utilisation d'engrais. C'est au Manitoba que le bilan du phosphore a le plus augmenté.

Description - Figure 4
1981 | 1986 | 1991 | 1996 | 2001 | 2006 | 2011 | |
---|---|---|---|---|---|---|---|
Colombie-Britannique | 4,53 | 5,04 | 4,69 | 5,90 | 5,76 | 4,77 | 2,11 |
Alberta | -1,18 | 0,12 | 1,80 | 2,25 | 4,98 | 5,13 | 2,39 |
Saskatchewan | -0,85 | -0,46 | -0,69 | -0,32 | 2,32 | 2,32 | 1,55 |
Manitoba | 0,28 | 1,69 | 2,68 | 2,51 | 4,41 | 4,31 | 5,77 |
Ontario | 5,45 | 5,05 | 3,59 | 2,21 | 3,94 | 0,96 | 1,73 |
Québec | 13,63 | 14,58 | 15,05 | 11,47 | 8,56 | 5,50 | 8,98 |
Provinces Atlantiques | 17,60 | 20,43 | 19,93 | 17,74 | 19,93 | 17,30 | 16,18 |
*Les provinces de l'Atlantique comprennent le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, l'Île-du-Prince-Édouard et Terre-Neuve-et-Labrador.
Tendance 2 – Les précipitations augmentent le risque de contamination.
Outre l'accumulation de phosphore dans les sols, le deuxième facteur important qui influe sur le risque de contamination est le transport – c'est-à-dire comment le phosphore peut être déplacé des sols aux eaux de surface. L'eau est le principal moyen de transport, par le ruissellement des eaux de fonte des neiges ou des eaux de pluie, surtout lorsqu'il fait tempête. En 2011, dans les régions du sud des Prairies où le risque était élevé, les valeurs attribuées aux sources de phosphore étaient en fait assez faibles, mais le risque de transport était très élevé en raison des conditions météorologiques extrêmes cette année-là. La figure 5 montre le débit de la rivière Assiniboine à Headingley, au Manitoba, qui illustre de manière éloquente l'impact des précipitations exceptionnellement abondantes au printemps et à l'été 2011. Cette année-là, la quantité de neige dans les Prairies a été beaucoup plus importante qu'en 2006 et environ le double qu'en 2001, lorsque le risque global était beaucoup plus faible. La fonte des grands amoncellements de neige a coïncidé avec des pluies printanières plus abondantes qu'à l'habitude, donnant lieu à un ruissellement record et à d'importantes inondations partout dans le sud des Prairies. Toutes ces précipitations dans les Prairies ont considérablement augmenté le risque de contamination de l'eau par le phosphore cette année-là et ont influé sur la tendance nationale de l'indicateur. À l'inverse, le risque très faible de contamination de l'eau par le phosphore en 2001 peut être attribué à des quantités de ruissellement nival et pluvial exceptionnellement faibles dans les Prairies cette année-là. Dans l'est du Canada, la situation est demeurée stable de 2006 à 2011.

Description - Figure 5
Janvier | 41 mètre cube |
---|---|
Février | 40 mètre cube |
Mars | 30 mètre cube |
Avril | 131 mètre cube |
Mai | 287 mètre cube |
Juin | 112 mètre cube |
Juillet | 90 mètre cube |
Août | 44 mètre cube |
Septembre | 26 mètre cube |
Octobre | 22 mètre cube |
Novembre | 24 mètre cube |
Décembre | 55 mètre cube |
Janvier | 87 mètre cube |
---|---|
Février | 78 mètre cube |
Mars | 64 mètre cube |
Avril | 210 mètre cube |
Mai | 507 mètre cube |
Juin | 512 mètre cube |
Juillet | 470 mètre cube |
Août | 349 mètre cube |
Septembre | 175 mètre cube |
Octobre | 108 mètre cube |
Novembre | 64 mètre cube |
Décembre | 62 mètre cube |
Pourquoi cet indicateur est important
Le phosphore est un élément essentiel aux plantes et aux animaux. Il est introduit dans le sol par l'épandage d'engrais inorganiques phosphatés, de fumiers et de biosolides en vue de maintenir le rendement des cultures. Depuis le début des années 1950, l'intensification de la culture et de l'élevage a porté la teneur en éléments nutritifs du sol dans certaines régions à des niveaux excédant les besoins des cultures. Ces surplus ont enrichi le sol et augmenté le risque de transport du phosphore des champs vers les plans d'eau de surface. Les apports excessifs de phosphore contribuent à l'eutrophisation des eaux douces et à la prolifération d'algues, qui peuvent altérer la qualité de l'eau et en restreindre la consommation ou l'utilisation pour la baignade ou d'autres activités récréatives. La perte de phosphore du sol représente un problème environnemental, mais aussi une perte économique pour les producteurs, puisque cet élément nutritif précieux n'est plus disponible pour les cultures.
Les producteurs agricoles peuvent atténuer les risques dus au phosphore en adoptant des pratiques de gestion bénéfiques (PGB) qui réduisent les doses d'application ou empêchent le phosphore d'atteindre les plans d'eau.
Pratiques de gestion bénéfiques
Les stratégies de réduction du risque de contamination de l’eau par le phosphore sont notamment de mieux faire correspondre la quantité de phosphore appliquée au sol et les besoins nutritifs des cultures et de réduire les risques de transport du phosphore jusqu’aux eaux de surface.
L’analyse du sol est une mesure essentielle pour déterminer la quantité de phosphore présente dans un sol avant l’application d’engrais ou de fumier, qui peut être dosée en conséquence. L’ajout aux rotations des cultures de plantes fourragères ou d’autres qui absorbent beaucoup de phosphore aide à en réduire les surplus et à diminuer le bilan du phosphore du sol. Les éleveurs peuvent réduire la quantité de phosphore dans le fumier en passant à des aliments pour animaux contenant l’enzyme phytase, laquelle aide les animaux à digérer le phytate, principale forme de stockage du phosphore chez les végétaux. Vu que le ruissellement est un mode de transport si important, il faut absolument que l’épandage d’engrais et de fumier se fasse lorsque les conditions météorologiques sont adéquates et selon les techniques d’application recommandées. L’établissement de bandes tampons autour des plans d’eau de surface aide à piéger et à filtrer le phosphore particulaire du ruissellement, et l’utilisation d’espèces végétales présentant un intérêt économique dans ces bandes tampons peut aider à compenser les coûts d’établissement et d’entretien de ces zones.
Calcul des indices de performance
L'indice de performance agroenvironnementale montre l'état de la performance environnementale et les tendances au fil du temps à partir d'une pondération du pourcentage de terres agricoles dans chaque catégorie d'indicateur, ce qui donne un indice variant de 0 (toutes les terres dans la catégorie la moins souhaitable) à 100 (toutes les terres dans la catégorie la plus souhaitable). L'équation est simple : (% dans la catégorie « médiocre » multiplié par 0,25) plus (% dans la catégorie « moyen » multiplié par 0,5) plus (% dans la catégorie « bon » multiplié par 0,75) plus (% dans la catégorie « souhaitable »).Comme le pourcentage des terres dans la catégorie « à risque » est multiplié par zéro, il n'est pas inclus dans l'algorithme.
Le tableau ci-dessous montre les catégories de l'indice. L'indice utilise la même palette à cinq couleurs que les cartes d'indicateurs, où le vert foncé représente un état souhaitable ou en santé et le rouge, l'état le moins souhaitable ou le moins en santé.
Échelle | Couleur | Catégorie |
---|---|---|
80-100 | vert foncé | Souhaitable |
60-79 | vert gai | Bon |
40-59 | jaune | Moyen |
20-39 | orange | Médiocre |
0-19 | rouge | À risque |
L'indice groupe et généralise les tendances, et il doit donc être considéré comme un outil stratégique donnant une vue d'ensemble de l'état et de la tendance au fil du temps.
Indicateurs connexes
- L’indicateur de l’azote permet de suivre le risque de contamination de l’eau par l’azote.
- L’indicateur des coliformes permet de calculer le risque de contamination de l’eau par des coliformes provenant de l’agriculture.
- L’indicateur des pesticides permet de suivre le risque de contamination de l’eau par les pesticides.
Autres ressources et documents téléchargeables
- Pour plus de détails sur cet indicateur, nous vous invitons à consulter la publication intitulée L'agriculture écologiquement durable au Canada : Série sur les indicateurs agroenvironnementaux – Rapport no 4.
- Découvrir et télécharger des données géospatiales concernant cet indicateur et d'autres indicateurs.
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